Bernard Leplat et les élèves de la classe de 1re Bac Pro élevage support équin de la MFR de Vimoutiers

Après une drôle de guerre, Bernard Leplat rejoint la Résistance dans le groupe Vengeance, suivant l’exemple de ses parents. La journée du 26 juin 1944 le marquera à jamais.

« Le 28 novembre 1939, je suis  mobilisé dans l'Eure où je suis affecté au peloton des transmissions : à l'époque c'était le morse. L'hiver 1939-1940 est très froid avec de fortes gelées et une épaisseur de 30 cm de neige ». Bernard Leplat est victime de l'épidémie de grippe. Une fois rétabli, il rejoint son régiment : « Nous couchions dans une porcherie qui avait reçu 200 cochons ! » Fin mars 1940 son régiment prend la direction de Marseille par voie ferrée : « Dans des wagons à bestiaux, sans aucune commodité… » Puis c'est l'embarquement pour le Liban en mai. A peine arrivé, Bernard Leplat est de nouveau alité. Le diagnostic est sans appel : la dengue. Après un mois d'hospitalisation, il rejoint son régiment vers Alep, puis, repart pour Damas. La France capitule : « On a dû alors se battre contre les Anglais. Mais c’est peu dire que le coeur n’y était pas. » Il rentre en France en octobre 1941 avant d’être démobilisé l’été suivant. « Ne sachant pas quoi faire de nous, ils nous ont renvoyés définitivement dans nos foyers ».

« Ne pas parler » 

26 juin 1944 : l’Orne est loin d’être libéré, il faudra attendre encore deux longs mois avant de pouvoir hisser de nouveau le drapeau tricolore. La ferme familiale à Neauphe sur Dive, entre Trun et Chambois, est investie par la Gestapo française et des soldats allemands qui entourent deux camarades résistants prisonniers. Très rapidement Bernard, son frère Hubert et leur père sont alignés le long du mur de la grange puis conduits dans l'étable les bras levés. Les soldats font tourner des gourdins et des nerfs de boeufs en riant : « On va bien s'amuser ! » Le père de Bernard passe le premier : "Ses cris m'ont bouleversé !", puis c’est le tour des fils. Les nervis le font mettre à plat ventre, les bras en croix, face contre le béton. Ils tapent chacun leur tour : "Je crie comme les autres." Les bourreaux posent les questions, Bernard reste de marbre malgré la douleur. « Les coups sont là, ils font mal mais il ne faut pas parler. » Une traction arrive et un Résistant de Trun en descend dans un sale état : il a dû subir lui aussi un interrogatoire musclé. Il est poussé vers les deux autres Résistants. Les Leplat sont toujours face au mur bras levés avec des soldats allemands mitraillette à la hanche. Un gestapiste les ramène dans leur maison. La famille libérée entend le crépitement sinistre des mitraillettes : c'en est fini des trois héros. La maison est dans un désordre inouï : on a fouillé partout, pris l'argent et les bijoux.
Carte de membre du mouvement de Résistance Vengeance.

« Fume, tu sentiras moins » 

Deux jours après la fin du carnage de Chambois, Bernard Leplat et son beau-père, vont voir le champ de bataille à Moissy. Le spectacle est effrayant : des chevaux morts se mêlent aux cadavres de soldats jusque dans la rivière. L’odeur est pestilentielle. Le beau-père lui propose alors une cigarette. "Fume, tu sentiras moins ! " Ce fut sa première cigarette. "Mais pas la dernière… » Le retour se fait dans un silence de plomb. « »

C'était horrible, je n'ai pas de mots assez forts pour décrire ce que l'on ressent, je crois que cela n'existe pas.