Rémi Douin et les élèves de Terminale ES du lycée Victor Hugo de Caen


A l’âge de 14 ans, Rémi Douin aide son père, Résistant, à la réalisation de cartes des défenses allemandes. Celui-ci, arrêté et torturé en mars 1944, sera fusillé à la prison de Caen, le jour du Débarquement.

Soixante dix ans après, Rémi Douin raconte l’histoire de son père, Robert Douin, avec toujours autant d’émotion dans la voix. « Quelqu'un qui m'est très cher, qui m’a toujours manqué. J’ai les larmes qui viennent facilement quand il s’agit de lui. C’était un grand résistant !», précise-t-il d’emblée. Les souvenirs de cette époque, en partie vécue à ses côtés, sont intacts. Jamais il ne s’est dit résistant, le héros c’était son père. Né en 1891, Robert Douin, a combattu durant la Première Guerre mondiale, blessé à deux reprises. Il en conservera un « tempérament très patriote ». En juin 1940, à la signature de l’armistice, Robert Douin, directeur de l’École des Beaux-Arts de Caen depuis 1930, est révolté. Dès novembre 1940, il s’engage dans le mouvement « l’Armée des Volontaires ». Un an plus tard, il est recruté par deux membres d’Alliance, un réseau de résistance très actif sur le territoire français, qui transmet des renseignements à l’Intelligence Service britannique. Robert Douin en devient le chef départemental en février 1942. Sa mission est de relever et cartographier les défenses allemandes sur le littoral, particulièrement les fortifications du Mur de l’Atlantique. Il transmet aussi tout renseignement utile aux Alliés. « Il recevait les renseignements de différentes personnes et c’est lui qui faisait les plans. Mais il fallait quand même aller sur la côte à bicyclette, il n’y avait pas d’autres moyens de locomotion. »



« Je l’accompagnais, en ignorant les risques » 


Rémi Douin durant son service militaire en 1947-48.
Robert Douin reporte ces informations sur les cartes d’état-major, agrandies par Rémi, transmises à Londres. Sur le terrain, pour tromper la surveillance de l’occupant, il fait semblant de peindre sur la plage, en toute innocence. Officiellement Robert Douin est artiste-sculpteur. A ses côtés, son fils, tandis que sa mère ignore tout. Le jeune Rémi est son « assistant-peintre ». « Je n’analysais pas les risques. Il fallait être prudent. Mon père était peut-être un peu plus conscient du danger, de ce qu’il risquait. Je ne peux pas dire avoir eu peur, mais être content et fier. » Il insiste : il ne savait pas tout des activités de son père. Ainsi, la cachette qu’il utilisait pour mettre la carte de 17 mètres de long reste toujours un grand mystère… Le jeune Rémi quitte Caen en février 1944. Son père est arrêté le 17 mars 1944, puis questionné, torturé et fusillé le 6 juin avec environ 60 à 80 membres de différents réseaux (dont 16 du réseau Alliance). C’est à Dives sur Mer, éloigné du Débarquement, qu’il apprend que son père est mort. Les corps ne seront jamais retrouvés.

Conserver l’esprit de la Résistance 

De toute cette histoire, il ne veut rien oublier mais transmettre. « Ce qui est très important, c’est de parler de mon père pour que son souvenir et le sens de ce qu’il a fait ne se perdent pas. Cela dépend maintenant de vous, les jeunes ! » Rémi Douin transmet ainsi le message hérité de son père : « Il faut toujours rester vigilant, ne pas se laisser dominer par les idéologies extrêmes. Il faut garder une indépendance d’esprit, être généreux, pour sa patrie et ceux qui nous entourent. Enfin, il faut conserver l’esprit de la Résistance ! Vous en connaissez beaucoup qui risqueraient leur vie pour la patrie ? »