Hans Höller et les élèves de 1re du lycée Littré d'Avranches

En 1944, Hans Höller commande une section de la 21e Panzerdivision, stationnée à Cairon, au Nord-Ouest de Caen. Il croit dur comme fer que les fortifications du mur de l’Atlantique rendent tout débarquement impossible…

Bien que tout laisse penser que le Débarquement allié se produira dans le Pas-de-Calais, Rommel est venu plusieurs fois en Normandie inspecter le système de défense. Le 30 mai, il donne ses consignes à la 1e Panzerdivision : la contre-attaque devra être immédiate en cas de Débarquement. Le Lieutenant Hans Höller enregistre l’ordre mais ne croit guère qu’il aura à l’exécuter. Non seulement, ce n’est pas en Normandie que cela se passera mais sa confiance est telle dans le mur de défense qu’une telle entreprise lui paraît inenvisageable ; encore moins sa réussite. Pourtant, sept jours plus tard, la section de Hans Höller se retrouve en fâcheuse position à tenter de repousser l’inimaginable déferlement des troupes alliées. Dès les premières heures de la nuit du 6 juin, ses canons antichars sont entrés en action contre la 5e Para Brigade dans le secteur du Château de Benouville. En vain, les Alliés traverseront Pegasus Bridge vers midi. « Nous étions isolés, sans pouvoir recevoir de soutien en provenance de l'arrière. » Le Mur de l’Atlantique que Hans Höller croyait infranchissable se fissure sous ses yeux. L’impossible est en cours… Et il doit se replier dans son abri à Hérouville où le 7 juin, sa section subit un pilonnage incessant. « Les bateaux, les chars, les avions : ça canardait de partout !» Durant plus d’un mois, les combats s’enchaînent comme une ronde infernale jusqu’à ce que les Allemands abandonnent ce qu’il reste de Caen. Le pire est encore à venir pour les perdants acculés dans le « Couloir de la mort » dont Hans Höller parvient à s’échapper en août 1944.
Hans Höller en 1944.


« Encombrant »

Mais deux mois plus tard, il est fait prisonnier dans les Vosges par les Américains. « Ayant moi-même toujours traité les prisonniers très correctement, j’ai été choqué de la manière dont j’ai été battu et presque abattu. Je suis arrivé dans un camp américain dans lequel j’ai été soumis à d’interminables interrogatoires. J’ai tenu bon et je suis resté inflexible. J’ai alors été envoyé à Marseille dans un wagon de marchandises, et finalement aux États-Unis par bateau. » C’est de l’autre côté de l’Atlantique qu’il apprend donc la fin de la guerre. « Alors, pour la première fois, j’ai pris conscience du fait que j’avais sacrifié ma jeunesse de manière absurde. » En février 1946, on le ramène en France où il est libéré le mois suivant après un ultime séjour dans un camp de prisonniers. Le retour à la vie normale a été très difficile au début : « J’étais très aigri et ne voulais plus rien savoir des événements de la guerre, ni en parler. Il m’a fallu un certain temps pour travailler omme ingénieur parce qu’en tant qu’ancien officier dans la Wehrmacht on m’estimait « encombrant. »

Une vie sauvée

Il lui faudra encore des décennies pour s’ouvrir à nouveau et « régler ses comptes avec ce passé douloureux. » En 1989, un voyage en Normandie l’y aidera. Il repasse alors par les lieux de combat et retrouve la famille du couple âgé qui l’hébergeait à Cairon et avec qui il dialoguait en anglais. Quand on lui demande s’il regrette certains actes que le Lieutenant Höller a pu devoir commettre, le digne vieil homme se souvient alors de ce grand bâtiment non signalé dans lequel il était entré avec quelques soldats. « Il s’est avéré que c’était un foyer d’accouchement qui n’avait pas été signalé par un drapeau de la Croix rouge. Alors nous nous sommes retirés pour empêcher toute attaque contre ce bâtiment de la part des Anglais. » Et puis, il y a ce jour de juillet 1944 où il reçoit l’ordre d’exécuter un résistant fraîchement arrêté. Il décide de le relâcher et demande à son sous-officier d'emmener le condamné à l'abri des regards et de le laisser filer. Ne dit-on pas que l’on mesure la valeur des hommes à l’aune de leurs refus ?